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dimanche 23 décembre 2012

Les égouts de Los Angeles


Les égouts de Los Angeles, de Michael Connelly. Traduit de l'anglais par Jean Esch.

455 pages d'un vrai thriller ! Rien que le titre donne envie. Titre US : The Black Echo: Comme il n'y a pas de nom pour ça, on en a inventé un. L'écho noir désignait l'obscurité, le vide humide que tu ressentais quand tu te retrouvais seul dans ces tunnels. Comme l'impression d'être mort et enterré dans le noir. Mais tu étais vivant. Et tu avais peur. Ton souffle résonnait suffisamment fort dans l'obscurité pour te trahir. Du moins, tu le croyais. C'est difficile à expliquer. C'est juste... l'écho noir. p. 365

À Los Angeles, le corps d'un toxicomane est retrouvé dans une canalisation de la ville. L'inspecteur Harry Bosch reconnaît la victime. Meadows était comme lui au Vietnam un "rat de tunnel", c'est-à-dire qu'ils nettoyaient des galeries souterraines creusées par le Vietcong. Les collègues de Bosch pensent qu'il s'agit simplement de la mort d'un toxicomane dans le cylindre étouffant des égoûts de la ville, mais certains détails attirent l'attention de l'inspecteur, et les évènements vont s'enchaîner, le FBI s'en mêler....Ce résumé montre un peu les limites du roman: on a l'impression d'avoir déjà vu ce genre de film au cinéma.
L'avantage de la littérature sur le cinéma, c'est qu'elle nous laisse notre liberté:  ralentir l'action, cette manière de vivre en temps réel des choses palpitantes et sordides, sans se salir les mains, comme ramper dans une canalisation et examiner un cadavre tandis qu'autour on ressent l'ambiance de la mégalopole californienne.

 Bosch est un enquêteur hors pair, beau portrait de flic teigneux, on imagine Sinatra ou Al Pacino dans le rôle. Le genre de flic qui se méfie quand les choses s'emboîtent trop bien, le genre de flic qui se frite avec  tous ses chefs...Sa collègue du FBI, Eleanor Wish, qui a eu accès à son dossier, campe en quelques phrases son portrait: Hiéronymus Bosch...La seule chose que vous a donné votre mère, c'est le nom d'un peintre mort il y a cinq cent ans. Mais j'imagine que tout ce que vous avez vu dans votre vie ferait ressembler les étranges visions qu'il peignait à un décor de Disneyland. Votre mère était seule. Elle a du vous abandonner. Vous avez grandi dans des familles adoptives, des foyers de jeune. Vous avez survécu, vous avez survécu au Vietnam, et vous avez survécu à la police. Jusqu'à maintenant du moins. Mais vous êtes un franc tireur qui fait un travail d'équipe. Vous avez réussi à entrer dans la brigades des cambriolages et homicides et à vous occuper des grosses affaires, mais vous êtes toujours resté un franc-tireur. Vous agissiez à votre guise, et ils ont fini par le vous le faire payer. 
Dès la page 112, Eleanor décrit Harry comme un survivant, et 200 pages plus loin, elle reste dans le sujet, quitte à en payer le prix...N'est-ce pas un peu son frère qu'elle sauve ainsi...
Autre limite du roman, son efficacité imparable, au détriment de la vraisemblance, du réalisme. Ce polar est une machine, un système où toutes les pièces du puzzle doivent s'emboîter, et on prend plein la vue.
Nous entrons de plain-pied dans l'action, en temps réel collé aux basques de l'inspecteur Harry Bosch. Nous savons ce qu'il entend, ce qu'il se demande, ce qu'il éprouve, dans un style sobre, descriptif, qui fait la part belle aux détails, aux objets réels de la vie quotidienne. Ce point de vue sur le personnage principal se décentre parfois sur des personnages adjacents comme les deux flics des affaires internes et leur chef, qui hésitent entre le lugubre et le comique, et servent de contrepoint au récit.
Si j'ai aimé? Bien sûr ! Mais je ne pourrais pas lire que ça. On a besoin, après, d'une littérature un peu plus hasardeuse, moins calibrée. N'empêche, si vous voulez un plaisir coupable de lecture, c'est ce qu'il vous faut.
J'ai fermé la dernière page, exténué par l'avalanche de révélations  qui suivent les scènes d'action dans les tunnels. Je suis sorti de là comme quand on sort d'une salle de cinéma et qu'on retrouve une réalité plus calme, les yeux papillonnent à la lumière du jour, il faut se remettre.

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