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dimanche 3 février 2013

Féerie générale Emmanuelle Pireyre


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J'étais vraiment curieux de lire ce livre, la surprise des prix littéraires de l'automne. Au-début, on se demande où on est tombé. Mais ça passe vite, grâce au style limpide de l'écrivain.
Un livre atypique qui désarçonne les commentaires. On est convié à une fête du langage, des personnages qu'on rencontre au cours d'une aventure, et que l'on quitte pour en trouver d'autres.

Comment a-t-elle écrit ce livre aussi original, qui ne ressemble à aucun autre.
Emmanuelle Pireyre avoue qu'elle prend de plus en plus de temps pour  écrire ses livres car c'est lié à sa manière d'appréhender le monde. Elle va de plus en plus loin dans la capture du réel. Il faut ensuite malaxer, agencer tout ça et regagner sa propre voix...

Elle utilise des discours qui existent déjà en s'appropriant leur force ("comme dans les arts martiaux" dit-elle) réflexions sur tel ou tel thème, articles résumés, livres auxquels elle prend de petits extraits, langue des forums sur internet, "une langue maladroite qui n'atteint pas son but, très inventive, entre l'écrit et l'oral."Son travail d'écriture consiste ensuite à retrouver sa langue à travers toutes ces langues, et plus elles sont nombreuses, plus l'auteur est satisfaite. Réinjecter le monde dans la littérature par ses langages.

Ce matériau composé de discours, de lectures, de questions et essais de réponses, l'auteur s'acharne contre lui, il résiste  parce qu'il est déjà dit, et qu'il faut  le "dédire".  Cela donne un aspect fragmenté, disparate au livre, et elle lui donne une unité grâce à une structure régulière: les sept chapitres sont introduits par une liste des personnages présents et un résumé sur le modèle des séries TV.
L'autre unité est donnée par un thème central et récurrent : la manière dont notre intime et notre sauvagerie propre peuvent s'inscrire dans le monde social et contemporain.

En résumé, des thèmes, une accumulation de matériaux, à partir des lectures, transformés pour en faire en livre. En évitant surtout les automatismes d'association. Prendre la foire internationale qu'est le réel et le transformer en féerie.
Ce que j'en ai pensé: pas facile de répondre à cette question. Lu sans difficulté, sans ennui, mais il m'a manqué la substantifique moelle.  Je retrouve dans mes notes beaucoup de phrases, d'expressions, à coté desquels j'ai mis trois croix, signe que j'ai envie de les recopier, d'en conserver une trace. Mais il y a un coté artificiel, gratuit, à cette fantaisie. On a envie d'être indulgent, car il y a de l'expérimental, une volonté d'innover. Sur Babelio, on retrouve un peu cet écart, entre saluer l'inventivité et une frustration de lecteur.
Le web est fait pour ça, être un laboratoire littéraire, avec les blogs, les sites, la manière de mêler les voix et les personnage. La forme enclose, fermée du livre n'est pas adaptée aux projets d'Emmanuelle Pireyre.
Un extrait qui m'a vraiment parlé:
Un jour où Linus avait beaucoup travaillé à l'architecture informatique, il tomba en transe et eut la vision de ce grand et beau Pingouin en train de déguster un poisson assis sur la banquise. Le Pingouin symbolisait le système d'exploitation qu'allait bientôt créer le jeune chercheur finlandais, et le poisson avalé représentait les codes trop complexes et les licences payantes. Le rêve de Linus signifiait que le grand Pingouin allait chasser et dévorer tout ce qui est trop compliqué, bidon et source de plantage. Il devait capturer l'ensemble des codes qui se tortillent comme des spaghettis, qui sont infesté de créatures dégradantes ou entravés par des licences inquiétantes et dangereuses. Le pingouin était serein sur la banquise, il n'aimait pas les emplois rémunérés, préférant qu'on se lève à n'importe quelle heure pour coder et qu'à d'autres moments, on laisse tomber pour jouer en réseau ou sortir faire un tour. Le Pingouin aimait les logiciels simples, astucieux, efficaces, gratuits. Depuis sa lointaine banquise des années 90, le Pingouin continuait de veiller sur l'esprit hacker, le copyleft et l'approche ludique du code. (p.135)

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