Pages

dimanche 5 mai 2013

Kurt Wallander va-t-il mourir ?

L'ultime Wallander ?
Roman policier.
La faille souterraine d'Henning Mankell, Le Seuil, 480 pages. Traduit par Anna Gibson. Date de parution 04/10/2012
J'ai décidé de muscler un peu mes titres, et après tout, dans chacune des histoires, le héros "mankellien" passe à un cheveu de la mort. 
 C'est un de mes écrivains préférés de ces dernières années. J'ai aussi lu deux romans "traditionnels"  (Profondeurs et Le Cerveau de Kennedy) qui m'ont moyennement plu. Bref, je suis accro à Ystad en Suède. Et, celui-là, c'est peut-être le der des der concernant Kurt Wallander .
Cinq nouvelles nous montrent l'évolution de l'homme et surtout de l'enquêteur Wallander. Du jeune flic qui piaffe d'impatience de quitter l'uniforme et les tâches ingrates pour les enquêtes de la Criminelle au jeune commissaire cornaqué par son mentor Rydberg.
Une remarque en passant. J'ai eu la curiosité d'aller voir sur google maps à quoi ressemblait Ystad, en Suède, province de Scanie. On peut voir la rue où habite Wallander, et son appartement. Aucun intérêt. La photo du lieu réel n'a rien à voir avec l'image qu'on a dans la tête. Deux univers dissemblables, incompatibles.

Le coup de couteau. Ce face à face avec la mort du policier de 22 ans était évoqué dans les romans comme un souvenir. Un suicide dans l'appartement voisin du sien donne l'occasion au jeune policier ambitieux de faire ses preuves et beaucoup d'erreurs... Son premier mentor, Hemberg lui dit : « Tu as commis toutes les fautes qu'il est possible de commettre ».

La faille souterraine. Wallander est pris en otage. Première irruption du continent africain et sa misère dans le monde de Wallander. Premiers tiraillements dans son couple avec Mona, mais normalement son retard devrait donner l'alerte à sa compagne ….

 L'homme sur la plage. Wallander est enfin commissaire à Ystad, la ville où il fera toutes ses enquêtes. Son couple ne tient que pour leur enfant, Linda, partie en voyage impromptu avec sa mère. Un homme meurt empoisonné à l'arrière d'un taxi. D'où venait-il ? « La situation était tellement improbable qu'elle méritait une explication - ne serait-ce que pour satisfaire son besoin de rationalité. Tous les meurtres possédaient un noyau logique. Il suffisait de retourner les bonnes pierres dans le bon ordre. »

La mort du photographe. Toujours ces portraits d'êtres solitaires, singuliers, aux vies secrètes. « Simon était plein de chambres secrètes »
Leur mort sert de prétexte pour enquêter sur leur vie.
Qui a bien pu vouloir tuer ce photographe aux habitudes bizarres
«Un petit homme qui maîtrisait le monde en déformant les traits de ceux qui ne lui plaisaient pas, qui passait du temps à détruire symboliquement le visage de personnalités connues» ?
 « Qu'un homme fût capable de mener une double vie et de cacher sa folie sous une apparence parfaitement normale, cela n'avait rien d'exceptionnel.»

Pyramide, la dernière nouvelle, la plus longue et la plus intéressante, presque un court roman. Rydberg, le mentor, est encore là et commence à sentir les premières atteintes de son mal. Avant de devenir le fantôme bienveillant des grandes enquêtes, celui que l'enquêteur interroge dans sa tête.
« Rydberg était célibataire. Il ne fréquentait pas grand monde ça ne semblait pas lui manquer. Après toutes ces années, Wallander ne savait toujours pas s'il avait, dans la vie, un véritable centre d'intérêt en dehors de son travail.»
Wallander, lui, a 43 ans. Quitté par sa femme, sa fille loin de lui, son vieux père plus qu'énervant, il est déjà cet homme qui pense :
« Je ne peux pas continuer comme ça. Quelque chose doit changer dans ma vie. Et vite. » La rengaine lancinante qui va rythmer les 9 romans de la série. 
Que faisait cet avion fantôme qui s'est écrasé en Scanie ? Qui pouvait vouloir du mal à ces deux mercières ?

J'ai retrouvé ce que j'aime chez Mankell/Wallander, cette écriture blanche avec ces phrases presqu'interchangeables qui traduisent bien l'attente , les moments de vides propices à la réflexion ou aux états d'âme au cours d'une enquête. Le point de vue est toujours centré sur Wallander, nous le voyons agir, nous savons ce qu'il pense. Tout ce qui fait que des millions de lecteurs se sont identifiés au personnage.

Ces phrases interchangeables avec lesquelles on pourrait écrire des romans où il ne se passerait rien, que le passage du temps:
« Il s'approcha de la fenêtre. La pluie neigeuse du matin s'était transformée en vraie neige.»
« Il but un verre d'eau. Ses pensées erraient sans but. »
« Le vent tourmentait les arbres de l'autre coté de la rue, sous une pluie fine »
« Il ne parlait jamais de lui. Il n'exprimait aucune émotion, aucune pensée personnelle »
«...une soupe en sachet qu'il dilua dans un peu d'eau »

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire