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mardi 19 août 2014

La vie rébus de Valérie Rouzeau pensant

Poésie
Valérie Rouzeau   Va où   (Le temps qu'il fait) 2002.
Les poules avaient perdu leurs dents comme des oiseaux de jamais plus et je ne voulais rien changer  
J'avais noyé le vieux poisson dans l'eau pure des métamorphoses où par amour on devient chèvre

Au début, c'est déconcertant à lire et puis on y prend goût assez vite. 
Pour mon amour en allé ma main nue puisque n'avons eu comme alliance que notre entente aux doigts croisés 
Déconcertant parce que ce n'est pas une prose classique sujet-verbe-complément, il faut aller chercher le sens, quêter les images, relire. Et le plaisir vient à s'arrêter sur ces rébus, sur ces formules à déchiffrer. On est dans inattendu verbal, dans la surprise sémantique permanente. C'est rafraîchissant de lire du Nouveau !
Lire une ligne, relire plus lentement, laisser s'opérer l'alchimie des mots les mots collés mariés (parole parabole, digne dingue), jamais de virgule, ni même de point, et attendre que se fasse une légère fusion dans le cerveau; une insoupçonnable secousse électrique sur le tracé du synapse, voyez comme ça m'inspire le Rouzeau. Les mots se répondent se répandent en sonorités, se gémellisent, il faut s'attarder, bien lire le rébus les images "gueule de loup dos d'âne et peau de lapin syllabes de chagrin yeux de pluie  poussière orpheline"... 

Le corps, les parties du corps se mélangent aux objets du monde réel.
Ma pensée se saisit de tout animaux plantes gens cailloux
Cela évoque souvent une gamine joueuse avec les mots joyeuse d'avoir des amis, une adulte au langage encore enfant qui cultive ses impressions, le temps qui passe, le temps vécu la vie passée et même l'heure de sa mort sous son tumulus...

Bref, cette poésie qui réveille le verbe réveille la vie aussi on a vraiment une sensation de fraîcheur, de vitesse, comme le vent dans le visage à la lecture. Les réseaux de mots mariés réveillent réaniment des champs de neurones, pulsation de l'infini dans le crâne-cerveau. 
Publié en 2002, ce recueil a connu un succès critique et public (10 000 exemplaires vendus, énorme pour de la poésie contemporaine). Ça m'a fait du bien de lire de la poésie, j'ai redécouvert le jeu avec les mots, elle a assoupli le langage comme une gymnastique, j'ai l'impression d'être moins raide. Un plaisir littéraire et cognitif. 
Le Monde 2002

Thierry Guichard: « Si on ne peut pas dire d'un écrivain qu'il apparaît comme un des grands du siècle à venir sans passer pour un flagorneur péremptoire, qu'il nous soit permis du moins de penser qu'il en est ainsi de Valérie Rouzeau. Et essayons de voir ce qui provoque ce sentiment. Lire la suite...»

André Velter: « En poésie, une voix nouvelle, ce n'est pas rien. Une voix vraiment nouvelle qui ne ressemble à aucune autre. Une voix qui se reconnaît au premier signe, au premier souffle, que l'on entend une fois pour toutes, et à chaque fois une fois pour toutes, comme personne. Depuis quelques temps ce prodige a un nom : Valérie Rouzeau. Et c'est un prodige qui dure. Lire la suite...



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